LE CINÉMA LETTRISTE (1951-1991)

par Frédérique Devaux

En 1951, à Cannes comme à Paris, deux films issus du mouvement lettriste font scandale : il s’agit du Traité de bave et d’éternité d’Isidore Isou et du Film est déjà commençé ? de Maurice Lemaître. Ces deux films aujourd’hui légendaires, précurseurs à la fois de  » dysfonction image et son  » et du  » happening  » chers aux années 60 et 70, sont les premiers maillons et les manifestes originaires d’une longue chaîne de films lettristes produits jusqu’à nos jours.

Dans la première partie du livre, l’auteur retrace au jour le jour la genèse des films d’Isou et de Lemaître, puis étudie la production cinématographique lettriste de Guy-Ernest Debord, Gil J. Wolman, François Dufrêne et Gabriel Pomerand autour de la revue Ion en 1952.

La seconde partie du livre est, quant à elle, consacrée aux productions lettristes depuis les années 60. Trois décennies pendant lesquelles les lettristes inventent, sous l’impulsion d’Isou, le cinéma  » imaginaire  » d’une part et le cinéma  » supertemporel de l’autre. Ce livre, le premier consacré à ce sujet, est à la fois une chronique des faits et une analyse de l’esthétique cinématographique lettriste. Il fait resurgir un pan entier de l’histoire du cinéma et de l’art contemporain en France et nous plonge au coeur du  » cinéma en tant que réflexion sur lui-même « .

Revue de presse :

« Isidore Isou, qui fréquentait la toute nouvelle Cinémathèque Française, adorait le cinéma et avait envie de faire un film. Il emprunta une caméra et réalisa son grand rêve qui était, au niveau des vues cinématographiques, de rendre celles-ci caduques en tant que reproduction du réel, c’est à dire de faire de celles-ci des supports à des manifestations diverses, et donc montrer que ce qui est important, comme dans la poésie, ce ne sont plus les ensembles – le poème, le mot- mais l’émiettement des particules.

De la même façon qu’on avait fait un sort à la lettre en poésie, au cinéma, on ne s’intéressait plus à l’ensemble, le plan, par exemple, mais à sa destructuration, à son émiettement. De façon plus générale, il faut se reporter à la théorie d’Isidore Isou, à savoir que pour lui, tout art passe par deux périodes : une première dites « amplique » de construction, donc d’amplification, et la seconde dite « ciselante », de repliement et de parcellisation, de recherche des pratiques fondamentales d’un art : la lettre dans le cas de la poésie, dans le cas du cinéma et de la photo, le grattage du support, donc des particules physico-chimiques »

Eric Paul, propos de Frédérique Devaux recueillis dans Patriote-Côte d’Azur, Nice, Juin 1993.

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Published under the direction of Christian Lebrat (who brought a program of Lettriste films to Australia in 1990) , this is the first book-length study of the Lettriste film movement, which first emerged in 1951 with Isidore Isou’s Traité de bave et d’éternité (Treatise of Drivel and of Eternity), a film with ‘chiselled'( hand-scratched) photographic images, wich was given the Prix des spectateurs d’avant-garde 1951 at the Cannes festival by a jury which included Jean Cocteau (it also won the Prix en marge du festival de Cannes), fomenting a ‘scandal’ in the press. Also in 1951Maurice Lemaître produced the first Lettriste performance film Le film est déjà commencé? ( Has the film already commenced?) Frédérique Devaux (who is also a filmmaker working in this tradition) first details the origins of the films of Isou and Lemaître, then discusses thebwork produced to the end of the 1960s by Guy-Ernest Debord, Gil J, Wolman, François Dufrêne,and Gabriel Pomerand (who published the lettriste review Ion in 1952). There follows an account of films made in the Lettriste spirit since then:’ imaginary’ and ‘supertemporal’ films, among others.
Devaux has produced a seminal study of the history and aesthetics of Lettriste cinema

Cantrills filmnotes, Melbourne (Australia), mai 1994.